Le pays des autres, de Leïla Slimani

L’automne est là et accompagné d’une météo qui lui ressemble : la pluie, le vent, la chute des températures. Nous en rêvions cet été, nos souhaits se sont réalisés. Et que fait-on par ce temps-là ? Et bien personnellement, j’ai une légère tendance à vouloir rester chez moi, à me faire un thé ou un chocolat chaud, me mettre sous un plaid avec un bon livre ou une bonne série. Ce week-end, c’était le roman et un roman comme je les aime, parlant du destin particulier d’une femme.

De quoi cela parle ?

Le pays des autres de Leïla Slimani raconte l’histoire d’une femme, française, qui rencontre son futur mari, soldat marocain, à la fin de la seconde guerre mondiale en France. Une fois la guerre terminée ils se marient et décident d’émigrer au Maroc à la fin des années 40. Mathilde découvre alors un nouvel environnement, une nouvelle culture, une nouvelle religion mais surtout un homme qu’elle croyait connaître et avec qui elle va partager son quotidien et sûrement le reste de sa vie. Ils s’installent près de Meknès sur un domaine agricole où tout est à faire. Mère de deux enfants, elle devra faire face à l’isolement du domaine, au manque d’argent mais aussi aux différents troubles qui embrasent à cette période le Maroc qui conduiront à l’indépendance de ce dernier en 1956. « Ici c’est comme ça » est la phrase qu’elle entendra de nombreuses fois, lui rappelant à la fois son statut de femme mais aussi celui d’étrangère.

Pourquoi cette histoire interpelle ?

Cette histoire interpelle car elle traite une période de l’Histoire franco-marocaine du point de vue des civils et en l’occurrence celui d’une femme française mariée à un marocain. Son mari, Amine a servi la France lors de la seconde guerre mondiale et se retrouve lui-même tiraillé de par son statut d’ancien soldat ayant servi la France et de ce qu’il se passe dans son pays pour sa libération.

Cette histoire brosse le portrait du Maroc des années 50 loin des villes et loin de la prospérité. Où comment une femme élevée en France avec certains droits doit s’adapter à un nouveau pays où la femme est alors reléguée au rôle d’épouse et de mère et n’est pas censée quitter le seuil de sa maison. Où la différence de religions et de rites peut être effrayant et déstabilisant. Où une femme lettrée et pleine de joie se retrouve isolée et pauvre, à la merci des revenus de son mari, et recherche un sens à sa vie pour pouvoir avancer et faire grandir ses enfants d’une manière digne. Où une femme insiste pour que sa fille reçoive une éducation malgré les sacrifices que cela engendre.  Où elle essaye tant bien que mal de garder une image « d’expatriée heureuse » aux yeux de sa famille restée en France, trop honteuse des conditions dans lesquelles elle vit. Enfin, où au bout de quelques années elle commence à agir comme on lui a demandé d’agir dès le début où elle a atterri dans ce pays. On se demande alors si elle s’est adaptée ou si elle a simplement déposé les armes, fatiguée de se battre constamment contre les injustices, pour se sentir en accord avec elle-même et maîtresse de son destin.

Enfin, outre la condition de la femme dans les années 50 au Maroc, les thèmes que l’auteure traite sont universels et passionnants : la guerre, la religion, l’immigration, la famille et l’argent.

C’est intéressant de voir qu’aujourd’hui encore de nombreuses femmes peuvent se retrouver dans cette situation, 70 ans après la période couverte par ce roman. Immigrées, dépendantes des revenus de leurs maris, isolées, s’occupant des enfants à la maison, à la recherche d’un destin à elles, et d’une activité qui les rendrait heureuse. Et même si certaines d’entre nous arrivons à un état d’indépendance assez confortable, nous savons qu’il persiste un fossé entre nous et les hommes en termes de revenus, de santé, de retraite, de travail etc. Combien d’années encore faudra-t-il pour que nous nous approchions vraiment de l’égalité ? Des décennies sûrement car certains gouvernements ont même tendance à revenir en arrière nous concernant…

Ce livre est à découvrir et à lire doucement, lentement afin de s’imprégner de chaque page, émotion et situation !

Un commentaire sur “Le pays des autres, de Leïla Slimani

  1. J’aime l’écriture de Leila Slimani et j’ai bien envie de découvrir ce roman. Oui l’égalité ce n’est pas encore pour demain, même si on avance dans certains domaines et on recule fondamentalement dans d’autres.
    Il y a encore beaucoup de femmes qui s’adaptent et finissent par lâcher les armes tellement le combat est rude et semble sans issue positive.
    Merci pour ce partage et belle journée!

    Aimé par 1 personne

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