La solitude

La semaine passée, lundi plus exactement, j’ai été envahie par la frustration et la tristesse. J’ai d’abord eu une certaine colère qui est montée en moi pour terminer la journée en pleurs, et sans pouvoir m’arrêter. Si ce genre de moments arrive, je laisse venir et j’essaye de comprendre après ce qu’il s’est passé. Tant pis pour les yeux gonflés ou le public qui m’était réservé dans la rue ou dans les transports, c’est une chose que je n’arrive pas à contrôler.

Sur le moment je n’ai pu mettre le doigt que sur une seule situation, mais après la crise terminée, j’ai compris que c’était un ras le bol général de ces dernières semaines.

Effectivement, depuis un peu plus d’un mois maintenant, depuis que je suis revenue de mes vacances, j’ai l’impression de courir après les gens pour les voir. Pour rappel, je suis fille unique, je n’ai plus de famille et actuellement (plutôt) célibataire. Donc à part le travail, ma vie sociale tourne autour de mes amis. De la petite école à l’âge adulte (avancé) qu’est le mien, grâce aux différentes villes et pays dans lesquels j’ai vécus, j’en ai toujours eu. Les cercles changent avec le temps, mais la sociabilité reste présente. Or ces derniers temps, je galère clairement à avoir une vie sociale.

Je vais donner quelques exemples. On me réserve un déjeuner, un dîner pour m’annuler en dernière minute pour me re-booker trois semaines après. Trois semaines après ? On me pose « des options », traduction : on me bloque du temps sur plusieurs jours (un peu comme au travail), pour m’annuler le jour même, voire au moment même. On me propose de s’appeler dans deux ou trois semaines, car « pas le temps » ces derniers jours… Mon téléphone ne sonne plus non plus. Je propose, mais on ne me propose plus voire on ne me répond même plus. Je ne parle même pas des week-ends, mais des jours de semaine. Je ne parle pas de personnes mariées avec des enfants, mais simplement des célibataires ou couples sans enfant.

Mes derniers week-ends ont ressemblé à des pages blanches. Dans le passé j’aurais été ravie: improviser mon temps libre. Mais quand il n’y a plus personne avec qui improviser, cela change la donne.

Au vu de l’emploi du temps plus que rempli de mes proches, je me suis dit que moi aussi je devrais commencer à prévoir des choses ? Monter à Paris me semblait être une bonne idée, je n’y suis pas encore allée cette année, eh bien devinez quoi ? Toutes les personnes contactées (ou presque) sont absentes ou pas disponibles… Les temps ont bien changé.

Je ne sais donc pas si c’est notre âge ou les situations personnelles de mes amis avec leur famille, partenaire et travail, ou encore si de leur côté il y a une peur du vide à devoir remplir constamment, mais en tout cas le résultat est le même : je me sens exclue et la solitude commence à se faire sentir.

Alors que les choses soient claires, je suis quelqu’un qui adore être seule. De type introvertie, mais sociable, j’adore passer du temps seule, faire des choses seule mais aussi avec les autres. Mais trop, c’est trop…

Alors je me demande où est donc passée la spontanéité ? Que si ma compagnie n’est plus autant recherchée, il doit y avoir une raison ? Est-ce moi ou bien quelque chose que j’ai fait ? Pourquoi tout le monde court après son temps et pourquoi je n’en fais plus du tout partie dernièrement?

Car pour moi, aussi naïve que je sois, le temps est tout ce que nous avons. Il est limité et nous ne savons pas à l’avance dans quelles proportions. Tout ce que nous vivons peut se terminer demain ou dans trente ans. Dès lors, ce que je construis dans ma vie n’a aucun sens, aucune saveur, aucune valeur, si je ne peux le partager avec les gens que j’aime et passer du temps avec eux. Mais je ne peux pas les forcer non plus. Même les deux derniers partenaires que j’ai eus avaient un emploi du temps de folie : chaque semaine, chaque jour, chaque week-end étaient planifiés à l’avance…Et vivre comme cela, personnellement cela m’angoisse. Pour moi la vie ne peut pas être constamment contrôlée, on doit la laisser venir, laisser les choses arriver et tout simplement se laisser vivre. Ne dit-on pas que c’est l’imprévu qui change la vie ? Que les meilleures soirées sont celles qui n’étaient pas prévues ?

En attendant, la solitude tue, et ce n’est pas la première fois que je me fais la réflexion. Elle ne touche pas forcément que les personnes âgées et les célibataires. Je sais aussi parfaitement que des personnes bien entourées peuvent aussi se sentir seules, mais elles le disent encore moins.

Le délitement des liens filiaux et communautaires est une réalité. Les nouvelles technologies qui ont apporté nos téléphones portables et les réseaux sociaux nous isolent et nous divisent, alors qu’ils nous promettaient le contraire. Grâce à eux nous ne prenons plus le temps de nous voir ou de nous appeler sous prétexte que l’on est tout le temps joignable ou que nous postons sur nos réseaux nos activités. Les gens ont une obsession du « vivre à fond » pour « ne rien manquer » : voyages, événements, sports, restaurants… Ils déménagent à l’autre bout de la planète et se retrouvent à manquer (ce qui est pour moi) l’essentiel : le temps passé avec leur famille et leurs vrais proches.

Lundi soir, au milieu de quelques larmes je me demandais qui appeler, chez qui aller me réfugier ? La réponse est la même depuis quelques années : ma meilleure amie mais vivant à quelques centaines de kilomètres d’ici. Un de nos souhaits absolus serait de vivre dans la même ville, être présente physiquement l’une pour l’autre, dans les bons comme dans les mauvais moments. Ensemble, nous avons eu cette réflexion cette semaine : à 35 ans, nous constatons amèrement que le simple fait de ne pas être en couple et ne pas avoir d’enfant, exclut d’un grand nombre d’interactions sociales.

J’ose espérer que ce n’est qu’une période à passer. En attendant, il est aussi peut-être temps pour moi de me trouver de nouveaux projets, un nouveau cercle d’amis et (ou) de me prendre un chat…

14 commentaires sur “La solitude

  1. Je ne sais pas que dire. Je remarque le même problème chez moi depuis déjà une décennie. C’est un peu l’époque et la technologie, mais quelque chose ne va pas en plus, j’en suis sûr. Je n’arrive pas à mettre le doigt sur le problème, mais je te rassure, c’est plus commun qu’on aimerait le croire.

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  2. Bonjour CDP (carnets de plume 😉). Sensation partagée également et depuis très longtemps, peut-être bien depuis toujours…il m’arrive souvent de ressentir de la solitude alors que je suis plutôt indépendant voir parfois solitaire. Bizarrement, alors que j’ai besoin de solitude, par moment c’est elle qui me fait souffrir.

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      1. Je te remercie CdP, pour le courage j’ai ce qu’il me faut. J’ai bien observé ce sentiment de solitude ces derniers temps. J’ai remarqué qu’il ne frappe pas au hasard chez moi. Il se manifeste toujours quand il y a une faille quelque part, un sentiment de rejet, de trahison, d’abandon…et ce même si je ne suis pas seul. Je vois la solitude comme une réaction à un évènement extérieur, une sorte de message d’alerte de mon corps et non pas comme une fatalité. Cela m’aide à m’en détacher et à y remédier 🙂.

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  3. Je crois que c’est en effet un mal actuel répandu dans notre société. Parfois même en vivant dans la même ville, le même quartier, impossible de se voir régulièrement, il faut prendre rendez-vous et si on ne se croise pas sur le chemin de l’école, on ne se voit pas!
    Les réseaux étaient plein de promesses mais force est de constater qu’elles n’ont pas été à la hauteur.
    Comme toi je suis plutôt solitaire mais je suis contente de voir du monde, de partager, d’entretenir des liens. Et ces moments se font de plus en plus rares, quelque soit la situation personnelle des gens.
    Je te souhaite de rebondir vite.

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  4. Même constat à propos des réseaux sociaux, c’est un leurre absolu, qui plus est parfois dangereux…
    J’ai toujours en tête l’image d’une bande de potes marchant de front dans une rue de la capitale où ils étaient de sortie, mais… ils parlaient tous à leur téléphone au lieu de discuter entre eux !
    J’ai fui, à la campagne, ma vie n’y est peut-être pas mirobolante, mais offre plus de possibilités d’occuper intelligemment mon temps libre.
    Quant au chat… c’est une compagnie certes bien agréable, mais les ronrons presque à volonté ont un revers, c’est un animal casanier qui n’aime pas que l’on perturbe sa routine, à terme on en devient un peu l’esclave. S’il n’est pas habitué à voyager avec sa 2-pattes dès sa jeunesse, finies les vacances au pied levé, et il est difficile d’interpréter un miaulement en réponse à une question ! 😉
    Bon courage à toi !

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