Mon corps, cette bataille

C’est officiel, je ne fais plus du 38… Ce n’est pas une nouvelle fulgurante, mais c’est un constat sur moi-même. Un changement que je n’ai pas vraiment vu venir et dont je me suis rendue compte ces dernières semaines durant deux sessions shopping.

Le shopping, je n’en suis pas une adepte. Enfant et adolescente, il était une nécessité pas une habitude. On ne passait pas tous les samedis dans les magasins, on n’en avait pas les moyens, mais quand on y allait, c’était parce qu’il le fallait : changement de taille, besoins féminins (soutien-gorge) ou tout simplement remplacement de vieux vêtements déteints ou usés. Et j’ai gardé cette habitude : je pars faire les magasins seulement quand j’ai un réel besoin.

En l’occurrence, après avoir fait le tour de ma petite armoire début septembre, j’ai eu du mal à m’avouer que je ne rentrais plus vraiment dans un bon quart de mes robes, pantalons, et que je me sentais trop serrée dans presque tout le reste… Il a bien fallu donc renouveler ce que j’avais.

La sentence des tailles dans les magasins s’est vite fait sentir : 40, 42, L, XL. Ce ne sont que des chiffres et des lettres, mais qui prennent un sens nouveau que je lis depuis des années dans les magazines : je n’aurais plus autant le choix qu’avant. Et effectivement, il y avait des vêtements qui ne dépassaient pas la taille 38 ou la taille M selon les catégories et les magasins dans lesquels j’ai l’habitude d’aller… En soi, cela m’incitera à acheter encore moins, mais cela révèle une certaine frustration et une injustice aux corps qui ne sont pas dans cet idéal féminin créé de toute pièce par notre société et/ou aux corps qui changent simplement avec le temps.

Car oui, le corps change et naturellement. Je n’ai pour ma part changé aucune habitude alimentaire, ni d’activités physiques depuis des années. Je pense manger équilibré, je n’ai jamais fait de régime et je fais du sport régulièrement. Et pourtant, le tour de mes jambes, de fesses, de hanches, de ventre et de poitrine ont pris quelques centimètres. Cela me dérange, mais pourquoi ?

En tant que femme, nous avons une histoire très spécifique avec notre corps car il y a un souhait de contrôle et de possession de la société sur celui-ci depuis la nuit des temps. C’est un peu comme si notre corps ne nous appartenait pas complètement en tant que tel.

Parler du « plus vieux métier du monde » est un des exemples intemporels de l’utilisation de notre corps. Il était et est toujours le moyen de subsistance de nombreuses femmes lorsqu’elles n’ont plus le choix. Le corps féminin est un produit/service qui peut être loué pour quelques minutes ou quelques heures (lorsque bien entendu, il n’est pas pris de force).

En termes de législations, notre corps est toujours discuté dans les gouvernements du monde entier notamment pour les droits de l’avortement, moyens de contraception, procréation et congé maternité. Les hommes de nos parlements sont souvent eux qui discutent de ce que notre corps doit consommer, subir, vivre au nom du bien-être de notre société. Un non-sens complet, à mon avis. Et si on inversait la tendance, que se passerait-il?

Puis notre poids et nos formes ont toujours été source de critiques et de fantasmes, mais auprès de qui ? Les hommes et… des femmes entre elles. Nous sommes nos plus grandes ennemies et nous sommes la source d’un business très lucratif et infini.

Les instituts de beauté promettent une peau sans rides, sans cellulite, sans veines apparentes, sans poils… Et pour les femmes qui ont encore plus les moyens (et encore moins confiance en elles), elles passent par le bistouri à un moment donné de leur vie pour modeler leur corps aux derniers diktats de beauté. Les produits de beauté nous promettent aussi des miracles à la condition de se tartiner tous les jours de crèmes anti vergetures, anti-rides, anticellulite etc. Un travail constant et fatiguant en matière de charge mentale.

Quant à la mode vestimentaire, elle est aussi infinie et contraignante : culotte ventre plat, gaine, collants amincissants, corsets… Mais pourquoi nous empêche-t-on à tous prix de respirer ?

Qui a décidé qu’il fallait avoir un ventre plat, une peau sans cellulite et sans poils et j’en passe ? Car c’est une bataille perdue d’avance ! D’ailleurs les hommes ne la mènent pas (ou si peu) … En revanche nous pourrions nous réjouir de faire tourner une bonne partie de l’économie, c’est peut-être cela l’objectif caché?

L’énergie et l’argent dépensés pour un idéal de beauté inatteignable, ce n’est (plus) pas pour moi. Il y a autre chose à faire dans ce monde que de se préoccuper autant de notre corps. Et des choses tellement plus intéressantes…

Alors oui j’ai pris une ou deux tailles de plus, mais dorénavant, mon corps deviendra mon ami et plus mon ennemi. Je me suis rarement sentie aussi bien à l’intérieur de lui que ces derniers temps. Il fonctionne merveilleusement bien et sans douleurs. Et même si parfois j’ai l’impression de voir quelqu’un d’autre quand je me regarde dans le miroir, il va juste falloir que je m’adapte et que je comprenne que toute fluctuation de taille est un signe de vie. Mon corps s’adapte aux évènements intérieurs et extérieurs comme aux changements hormonaux ou encore au vieillissement. Il est mon plus grand allié, mon temple et sans lui, je ne serais pas ici.

Nos corps n’ont plus besoin d’être nos batailles, alors laissons les retrouver la paix qu’ils méritent.

4 commentaires sur “Mon corps, cette bataille

  1. Ton article me parle beaucoup à une période où je constate la même chose.
    J’ai aussi pris du poids dernièrement, sans changer quoi que ce soit dans mes habitudes et en faisant même plus de sport…
    Je fais plus de sport et mange mieux aujourd’hui qu’il y a 5/6 ans où j’étais un peu plus mince…
    Comme me l’a dit un médecin quand je suis allée faire un check-in de ma poitrine, le corps change au fil des ans quand on vieilli.
    J’ai un peu de mal à l’accepter mais j’essaie aussi de partir du principe que je n’ai pas de soucis de santé et ça vaut beaucoup, c’est même le plus important. Je trie et adapte ma garde robe à ces changements.
    J’ai toujours eu un rapport compliqué avec mon corps, à toujours me trouver trop grosse. J’ai vu ce matin une photo d’il y a 6 ans où j’étais plus mince qu’aujourd’hui et pourtant je me trouvais quand même trop grosse (par rapport à quoi, qui ? Sûrement par rapport aux « standards » de beauté dont on nous bassine à longueur de journée la tête).
    J’essaie de prendre du recul mais l’exercice n’est pas toujours facile 🫠

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    1. Merci pour ton commentaire et j’ai fait le même constat en voyant des photos de moi d’il y a quelques années… je me rappelle que je me trouvais déjà grosse à l’époque, alors maintenant…Nous sommes en bonne santé et c’est tout ce qui compte ! Essayer de mincir à tous prix nous renderait malade, sans le moindre doute… Mais on va arriver à s’accepter! Courage et à bientôt !

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  2. J’aime beaucoup ta conclusion!
    J’ai eu moi aussi beaucoup de démêlés avec mon corps au fil des ans. Accepter qu’il change est peut-être un des premiers pas. Tant que la santé est là. Car le corps c’est avant tout la santé et non l’esthétique à tous prix comme on veut nous l’imposer depuis, depuis presque toujours…
    Mais entre ce qu’on sait et ce qu’on vit, il y a parfois un monde. A apprivoiser.

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