L’actualité de certains romans dystopiques

L’une de mes activités favorites est la lecture. Je la considère comme de la nourriture pour l’esprit. Je ne lis pas tout le temps ni tous les jours, mais quand je ne lis pas pendant un long moment, je le ressens un peu comme si j’avais une maladie, ou du moins un mal être. Alors pour y remédier je me remets tout simplement à lire.

Je suis encore « à l’ancienne », dans le sens où je lis des livres. Pas d’écran ni autre support. Mes livres commencent d’ailleurs à prendre de la place chez moi dans presque chacune des pièces. Mais c’est bon signe, nan ? Si la taille de la bibliothèque est plus grande que celle de l’écran qui trône dans le salon…

Je lis des romans et des essais. J’aime les histoires vraies, les histoires qui font appel à mes émotions et j’aime aussi en savoir plus sur certains sujets de société. Donc le roman dystopique ne m’était pas forcément destiné jusqu’à ce qu’on me parle de quelques-uns que je devais « absolument lire » du fait de l’actualité du monde, et plus particulièrement celles des Etats-Unis.

Fahrenheit 451, de Ray Bradbury

Fahrenheit 451 est un roman publié aux Etats-Unis en 1953. On y suit la vie d’un pompier, Guy Montag, dans une société futuriste où les pompiers ne sont plus en charge d’éteindre les incendies mais au contraire, de les allumer. Leurs cibles sont les livres et les bibliothèques car le pouvoir en place les interdit afin de garantir la paix. Cependant Guy va rencontrer une jeune fille de 17 ans qui va lui poser la question « Etes-vous heureux ? »  à laquelle il commence à y réfléchir sérieusement. Guy est marié à une femme qui passe ses journées à avaler des médicaments et à regarder les écrans qui remplacent les murs chez eux, et il ne se souvient même plus comment ils se sont rencontrés. Puis un jour, lors d’une mission, Guy vole un livre et sa vie va basculer…

J’ai lu ce roman d’une traite. Effrayée par la pertinence des faits relatés et de ce qui se passe aujourd’hui dans le monde, notamment concernant l’interdiction de livres dans certains pays comme les Etats-Unis. Cette semaine j’ai regardé le document sur Arte La guerre des livres et cela fait froid dans le dos de voir des personnes brûler des ouvrages par peur et/ou pure ignorance ou encore « au nom de la protection de ». Des scènes que l’on voyait à la montée du nazisme en Allemagne dans les années 30, se répètent aujourd’hui presque un siècle plus tard. On recense actuellement une censure de milliers de titres aux Etats-Unis…

La servante écarlate, de Margaret Atwood

La servante écarlate est un roman publié au Canada en 1985. On y suit la vie de Defred, « servante écarlate », qui vit désormais dans un état où la combinaison de la chute drastique de la fertilité et la prise du pouvoir par des fanatiques religieux, la réduite au rang d’esclave sexuelle (pour le salut de la patrie). Defred vit dans une maison (pour sa protection) où son rôle et sa responsabilité sont de donner vie à un enfant au Maître de maison (qui est marié), le Commandant. Dans cette société surveillée, violente et où tout est rationné, elle va rejoindre un réseau secret et va tenter de retrouver sa liberté car Defred se souvient. Elle se souvient du temps où elle pouvait circuler librement, où elle avait un mari, un enfant, mangeait ce qu’elle voulait, travaillait ou encore avait tout simplement le droit de lire…

Quand j’ai acheté ce roman sur un marché il y a quelques mois, je l’ai fixé de nombreuses semaines sur ma table de nuit sans oser l’ouvrir. Le compagnon de ma cousine (qui vit en Oregon et qui écrit de la science-fiction) me l’avait chaudement recommandé lors de mon séjour à Portland cette année. J’avais vu le trailer de la série et je m’étais dit que je ne pourrais pas soutenir ce type d’images et encore moins les lire….

J’ai pris mon courage à deux mains il y a quelques semaines et je l’ai lu : un véritable chef d’œuvre ! Magnifiquement écrit, je n’ai pas eu de nausées ou autre symptôme face à la violence décrite. Et depuis, j’achète et j’emprunte les ouvrages de Margaret Atwood.  Ce livre fait malheureusement tellement écho aux résultats des élections américaines de la semaine passée. Et cela fait effectivement peur car les ingrédients sont les mêmes : groupe religieux fanatique à la tête du pays (qui ont les pleins pouvoirs désormais), « protection » et contrôle des femmes, contrôle de la communication de masse, violence exacerbée…

Et c’est ainsi que nous vivrons, de Douglas Kennedy

Et c’est ainsi que nous vivrons est un roman récent publié en 2022. Nous sommes aux Etats-Unis en 2045 où fait rage une nouvelle guerre de Sécession qui a redessiné les frontières. Sur les côtes est et ouest, la liberté de mœurs est totale mais la surveillance y est constante. Dans les états du centre, le divorce, l’avortement et le changement de sexe sont interdits et les valeurs chrétiennes radicales font loi. On y suit la mission de l’agent des services secrets Samantha Stengel qui va devoir passer de l’autre côté de la frontière dans un des états les plus rigoristes à la poursuite d’une cible aussi familière que dangereuse.

Douglas Kennedy est passé au salon du livre de Genève cette année. C’est à la suite de l’une de ses conférences que j’ai acheté son nouveau roman. Le sujet me semblait, une nouvelle fois, d’actualité. Sous fond d’enquête policière certains détails semblent déjà tellement réels : les puces électroniques dans le corps, « l’aide » des machines pour tout et pour rien, la nécessité de savoir gérer toute émotion car chaque âme est sous surveillance et constamment observée, le choix vital de son statut familial (célibataire, marié, parent) afin de pouvoir accéder à des promotions etc… 2045 n’est pas si loin, et tout ce qui est relaté dans ce livre pourrait tellement être le reflet des Etats-Unis dans les vingt prochaines années.

Enfin, je pourrais également parler de 1984, de George Orwell. Roman plus difficile à lire mais également tellement d’actualité : la réécriture constante du passé et des événements qui contrediraient les promesses et le présent de « Big Brother ». Big Brother étant une technologie de pointe qui sait tout et voit tout jusqu’à la moindre des pensées de ses administrés. Ce roman a été publié en 1949…

Le point commun à toutes ces oeuvres c’est que chaque auteur/trice est parti d’observations et d’évènements de nos sociétés humaines qui existaient déjà à leurs époques et les ont tout simplement combinés et amplifiés. Lorsqu’on écrit, on ne peut que partir de ce que l’on connaît déjà, de ce que l’on a étudié, vécu.  Ces romans publiés il y a des décennies n’ont jamais été autant d’actualité et je vous conseille vivement de les lire, car ils sont encore accessibles chez nous. Ils sont peut-être prophétiques, mais ce qui est sûr, c’est qu’ils proviennent de la créativité, de l’imagination et de l’intelligence humaines, et celles-ci sans contrôle ni censure.

Bonne lecture et bon dimanche 😊!

8 commentaires sur “L’actualité de certains romans dystopiques

  1. J’ai lu et apprécié La servante écarlate même si je ne suis pas fan de science fiction (pas regardé la série). Et plusieurs autres romans de la même auteure.
    Je compte lire Et c’est ainsi que nous vivrons de Douglas Kennedy (il est aussi un de mes auteurs favoris américains).

    Mais les deux autres romans dystopiques m’ont toujours semblé difficile d’accès, car trop dans la fiction pour moi…

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    1. C’est cool de lire que tu les as lus aussi 🙂 ! Effectivement, tellement réalistes que je ne sais pas si on peut les qualifier de dystopiques de nos jours… Merci pour le partage de la liste! Il serait intéressant d’en lire quelques uns et de se demander pourquoi ils sont censurés…

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  2. J’ai lu tous ces livres sauf celui de Douglas Kennedy, mais je te mettrais en garde que la vérité sur ce qui se passe aux États-Unis quant aux livres est parfois plutôt éloignée de ce que l’on dit en Europe et même dans notre propre presse. Sans avoir regardé le documentaire sur Arte, il faut que j’évite d’en dire plus, mais disons que je ne reconnais pas le même tableau orwellien de mon pays que je vois souvent dans la presse européenne. (Ce qui n’est pas à dire que je n’en peindrais pas un autre, mais les deux auraient des différences importantes.)

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  3. Je n’ai lu que 1984 mais j’avoue que ce roman m’a déjà bien chamboulée. C’est fantastique (et tragique aussi) je trouve ces auteurs/autrices qui créent des œuvres qui des années plus tard prennent vie sous nos yeux. Ca fait froid dans le dos.

    Du coup je vais aller lire le roman de Douglas Kennedy et celui de Ray Bradbury – la censure des livres c’est quelque chose qui me révolte. Comme la censure de certains noms / mots d’ailleurs, mais c’est une autre histoire…

    Merci pour ce partage et belle journée!

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